Bonjour à tous et toutes,
Il y a 2 jours, je suis tombée sur un article montrant en photo la 1 de Grand Prix magasine. L’auteure de l’article dénonce ce qu’elle appelle « la maltraitance animale » car son cavalier utilise une double muserolle (je ne connais pas le nom spécifique) et des rondelles à picots. Voici la photo en question.
Au-delà de la polémique qui n'a pas tardé (du coup l'auteure a effacé son post...), je trouvais ça intéressant de parler, justement, de l’effet des muserolles sur les chevaux.
Les impacts étant assez nombreux (et je pense que nous en découvrons régulièrement), je vous propose de traiter le sujet sur plusieurs articles.
Bonne lecture :-)
Je commence cette série d’articles par une recherche menée par les Dr Fenner, Yoon, White, Starling et McGreevy aux Etats-Unis en 2016.
Hypothèse de départ, but de l’étude
L’hypothèse de départ est qu’une muserolle serrée induit un stress et du mal-être chez le cheval. Les chercheurs ont donc essayé de comprendre l’influence de l’augmentation du serrage de la muserolle sur le comportement et la physiologie du cheval.
Comment ?
L’équipe a pris 12 chevaux de 3 à 10 ans, hongres, étalons et juments mélangés, en bonne santé et n’ayant jamais porté de bride ni de muserolle « pull back ». Pendant 3 semaines, 4 jours par semaine, les chercheurs évaluent chaque cheval avec 4 niveaux de serrage de muserolle différents :
- Une muserolle détachée
- Un espace de 2 doigts entre la muserolle et le chanfrein (ce qui correspond aux recommandations générales)
- Un espace de 1 doigt entre la muserolle et le chanfrein
- Aucun espace entre la muserolle et le chanfrein, la muserolle étant serrée à fond
Quels indicateurs vont-ils suivre ?
Les vétérinaires vont chercher des différences de comportement (mastication, déglutition, clignement des yeux, mouvements d’oreilles…) et suivre 3 indicateurs de stress du cheval : la chaleur des yeux (par infrarouge, mesurée toutes les minutes), le rythme cardiaque et la variabilité du rythme cardiaque (mesurés toutes les secondes).
Le test
La même personne s’occupe des chevaux pendant 3 semaines à la même heure. Le test est composé de 4 phases, pour un total de 30 minutes. Tout d’abord, le cheval est sorti de son paddock, harnaché et amené à la zone de test.
- Phase 1 : Il reste immobile pendant 10 minutes, muserolle détachée
- Phase 2 : La muserolle est ajustée au niveau correspondant à son groupe pendant 10 minutes
- Phase 3 : Les chevaux sont débridés et laissés pendant 10 minutes
- Phase 4 : Les chevaux sont mis au paddock
Résultats :
Je vais vous épargner le résultat détaillé et la lecture des statistiques ;-) si vous souhaitez l'étude complète en anglais, contactez-moi :-) Voici les grandes tendances :
- Indicateurs mesurés : Un cheval à la muserolle serrée présente une augmentation significative du rythme cardiaque, une baisse de la variabilité du rythme ainsi qu’une augmentation de la chaleur des yeux comparable à celle observée chez des chevaux en compétition de saut d’obstacles. Les mesures cardiaques sont consistantes avec d'autres réalisées sur le stress du cheval. La conclusion est qu’une muserolle serrée apporte assez d’inconfort pour qu’elle provoque un stress. Ce stress peut provenir de l’inhibition de comportements habituels (mastication par exemple), d’inconfort ou de douleur, ou d’une combinaison des 2.
- Au niveau du comportement des chevaux : Tous les comportements classiques (mastication, bâillement, léchage…) ont été observés chez les chevaux pendant la 1ère phase, celle où la muserolle est détachée. Plus la muserolle est serrée, moins le cheval dégluti. De même, lorsque la muserolle est la plus serrée, les chevaux mastiquent moins, par douleur ou difficulté. Les léchages et bâillement disparaissent complètement. Vu que le mouvement de la mandibule est restreint, les chevaux ne peuvent donc pas avoir un comportement normal.
Il est à noter que, quelque soit le groupe, les chevaux lèchent, baillent et déglutissent beaucoup plus lorsque la muserolle est enlevée. Ce comportement post-expérience montre un état de manque qui peut indiquer un mal-être de l’animal, quel que soit le niveau de serrage de la muserolle.
Le fait d’empêcher un cheval d’avoir son comportement naturel est considéré aux Etats-Unis comme une violation de la liberté de comportement, pierre angulaire du bien être animal. Les vétérinaires avancent également l’hypothèse que la pression provoquée par une muserolle serrée provoque certainement des dommages au niveau des nerfs de la tête du cheval. Cette hypothèse est supportée par l’augmentation du rythme cardiaque des chevaux ayant la muserolle la plus serrée.
Ils notent enfin que cette étude pourra être complétée par d’autres avec un protocole différent comme l’utilisation d’un filet simple ou d’un autre type de muserolle. Egalement, il sera intéressant de tester les comportements avec une tension de rênes ou avec des chevaux ayant l’habitude d’avoir des muserolles serrées.
Voilà, j'espère que cet article vous aura plus :-) A bientôt pour la suite :-)
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