La semaine dernière, j'ai eu le plaisir de retrouver Yuki, la propriétaire de Délice. Figurez-vous que je montais avec Yuki à poney, il y a plus de 25 ans, et que nous ne nous étions pas revues depuis j'aime ces coïncidences de la vie 😍
Délice est une jument Haflinger typée sport que Yuki a acheté il y a 3 ans pour elle et sa fille, la jument a 8 ans. Coup de cœur immédiat sur cette jument qui ne correspondait en rien à ses critères de recherche
Je voulais vous parler du cas un peu spécial de Délice. Elle peut d’ailleurs illustrer mon post sur Respecter de comprendre le "non" des chevaux. Je vous préviens, c'est un peu long donc asseyez-vous si vous souhaitez tout lire 😊
Au point de vue historique, Délice a une ossification des processus palmaires (dans les 2 antérieurs) et a eu une tendinite du tendon fléchisseur superficiel à l'antérieur droit. Donc normalement, tout cela laisse des traces, des tensions, des raideurs que je devrais retrouver dans la séance.
Au tout début de la séance, il est très vite apparu que Délice a un besoin compulsif de manger sa paille et qu'elle sait utiliser la force pour arriver à ses fins (faims , ok, je sors )... Elle montre très peu de réactions à l'évaluation, ce qui est louche… Sa propriétaire me confirme qu'elle est "dur au mal". Cela veut dire qu'elle a un instinct de survie développée qui lui dit que "montrer ses faiblesses, c'est dangereux" .
Vu qu'en Masterson nous avons besoin de l'attention du cheval pour travailler (souvenez-vous, c'est le cheval qui guide la séance ), nous sommes sorties du box pour travailler ailleurs.
Seulement "ailleurs", nous avons été poursuivies par le tracteur puis par le foin le début de séance était donc un peu agitée et nous avons fini par trouver un endroit au calme et assez étroit pour la canaliser. Parce que Délice a du "gaz", de l'énergie, comme sa propriétaire. Et elle a beaucoup de mal à lâcher prise et le montre par son agitation. Elle tente d'avancer, recule, part sur un côté puis un autre. Elle ne souhaite pas qu'on lui prenne les pieds, surtout les antérieurs, ne semble pas attentive. Et pourtant, entre chaque mouvement demandé, chaque zone touchée, elle mâchouille, c'est un aveu que la méthode fonctionne malgré toute l'agitation .
A la fin de la séance, lorsque je travaille sur l’arrière-main, la jument devient de plus en plus calme et interactive. Pas le calme d'un cheval qui a lâché prise depuis 1 heure, mais ses mouvements sont plus lents, elle me montre où sont ses tensions (parfois avec sa force, je ne me sentais pas en danger mais je me suis bien faite coincée dans un coin, ce qui a beaucoup fait rire Yuki ). Elle finit par bailler et montrer un œil endormit. La séance se termine. Deux pistes se dégagent : 1. Contrôler la ferrure de la jument avec le maréchal 2. La jument a besoin d'apprendre que lâcher prise et se détendre physiquement et psychologiquement, c'est cool et ça fait du bien ce que nous avons obtenu pendant la séance, c'est ce qu'elle pouvait nous donner ce jour-là. Et c'est déjà beaucoup !
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J’ai 2 façons d’interpréter le cas de Délice et je vais le faire sur 2 posts différents. La 1ère façon, dont nous allons parler ici, c’est ce qu’on apprend en tant que praticien de Méthode Masterson. Notre rôle est de détecter le schéma de compensation des chevaux et d’identifier la cause du dysfonctionnement. C’est ce qu’on appelle la cause primaire. Je ne vais pas décrire tout le cas ici car cela serait trop long, je voulais juste partager une partie de ma réflexion sur les antérieurs parce que le trouve le cas intéressant .
Malgré son manque de réaction à l’évaluation, le fait que Délice ne soit pas coopérative lors de la prise de pied peut provenir de ses antécédents (rappel : ossification des processus palmaires et tendinite sur superficiel sur l’antérieur droit). L’ossification des processus palmaires créé des douleurs intermittentes dans le pied. De plus, lors d’une pathologie comme la tendinite, les chevaux compensent, généralement de l’autre côté, mais cela peut aussi être sur le diagonal opposé par exemple. Dans le cas de Délice, puisqu’elle est naturellement un peu sur les épaules de par sa race et conformation, il est logique qu’elle ait compensé sur son antérieur gauche et ce, malgré les ossifications. D’ailleurs, elle préfère s’appuyer sur son antérieur droit (ex-pathologique) que sur le gauche, ce qui va dans le sens de ce schéma. Si nous partons du principe que la tendinite a été bien traitée, il ne faut pas oublier qu'elle entraine un épaississement du tendon et une perte de flexibilité. Cela n'entraine pour autant pas des douleurs au quotidien et l'évaluation ne montrant rien à cet endroit, je ne pense pas qu'une douleur tendineuse soit la cause primaire des tensions de Délice aujourd'hui. Par contre, elle a pu l'être hier. La jument a mis en place un schéma de compensation (un problème de bas de membre/pied entraine des tensions dans les muscles le long du membre, les épaules, le garrot et la nuque et donc à l’arrière-main aussi puisque nuque et sacrum sont connectés…) et il faut savoir que sans aide, les chevaux ne savent pas "revenir à la normale" .
Donc ce n’est pas tant que Délice n’est pas coopérative dans sa prise de pied, qu'elle n'a pas envie, une des pistes est qu’elle est embêtée par des tensions un peu partout entre ses 2 antérieurs, ses épaules, son garrot et sa nuque, tensions qu'elle n'a probablement pas pu relâcher jusque-là. Ce qui m’emmène aux pieds. Lors de pathologies comme celles de Délice, il est important de favoriser la prise de talon. Les pieds de Délice sont un peu longs et manquent de talon. Yuki va donc discuter avec son maréchal pour aider la jument au mieux .
De plus, je lui ai laissé quelques exercices à faire régulièrement pour faire en sorte que la jument entre en interaction et se relâche. Qu’elle comprendre qu’on peut la comprendre et l’aider à se détendre. Jusqu’à la prochaine séance
La prochaine fois, je parlerai d'une autre façon de voir ce cas. Il sera question d'associer au physique la partie émotionnelle de Délice
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